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Utopiales 2017 – 2ème journée : Atelier JDR

Durant la conférence sur les Univers intemporels, j’ai appris l’existence d’un atelier de conception de jeu de rôle. Je m’étais alors dit qu’il y avait des chances que cela soit instructif, même si ça me coûtait de manquer quelques conférences.

Et ça l’était. C’est Manuel Bedouet (du podcast Ludologie) donc, qui s’était proposé d’animer cet atelier et commença la séance avec une présentation sur les jeux de rôle en format court. La présentation contenait d’ailleurs pas mal de références dont les liens se trouvent au bout de cet article. Évidemment, le concept m’a intrigué car quand je me suis attablé à la création d’un jeu de rôle il y a deux ans maintenant, j’en ai écrit des pages et des pages. Alors pouvoir résumer un jeu de rôle en moins de dix, ça me paraissait saugrenu.

Histoires et exemples
Tout commence avec le mouvement Old school renaissance (OSR) qui voit le jour grâce à la licence ludique libre et un assouplissement des droits d’auteur sur les créations de jeux de rôle. Ce mouvement voit l’apparition de nombreux clones et assimilés des premiers jeux Donjons et Dragons, mais c’est surtout dans ce vivier qu’apparaissent les One page dungeon, qui comme leur nom l’indique, constituent une aventure donjon d’une page. Ce ne sont pas à proprement parler des jeux complets, mais le concept est là et agitera la créativité des concepteurs pour les années suivantes.

Ainsi en 2007, John Grumph crée le DK de poche, un format court qui reprend le système DK. Il faut noter ici une certaine souplesse dans le principe du « une page », car ce DK de poche tient en vérité sur quatre. En 2008, Philippe Tromeur se lance le défi de créer un jeu d’une page, toutes les semaines et ce pendant 1 an. Un exercice qui démontre une créativité certaine. En 2009, John Harper fait paraître le jeu Ghost/Echo, déstabilisant par sa forme essentiellement graphique, où les images prennent la grande majorité des 4 pages. Il publiera aussi Lady Blackbird, bien plus textuel, en 16 pages.

La même année, Nicolas Dessaux, une figure influente du mouvement OSR, publie Searchers of the Unknown une forme minimaliste de D&D. Puis en 2012, c’est l’univers de Cthulhu qui passe par une compression en format court, sous la plume de Graham Walmsley. Aujourd’hui on peut compter Grant Howitt et Manuel Bedouet qui s’essayent au genre.

Pour qui, pourquoi, comment ?
Le format court constitue tout d’abord un bon exercice de conception pour les game designer. En réduisant le jeu à une seule mécanique de résolution, on est forcé de s’assurer que cette mécanique retranscrive bien le concept développé. Du reste, le format court est rapide à écrire et à mettre en page, pour peu qu’il soit bien pensé. Pour les joueurs, un tel jeu est facile à prendre en main et à appréhender. Le peu de règles qu’il apporte est simple à assimiler et laissera la part belle à l’interprétation. Ce format est donc approprié pour les parties rapides, pour faire découvrir le jeu de rôle à des débutants ou pour expérimenter de nouvelles mécaniques. A l’inverse, le format court ne permet pas d’articuler un univers riche ou de longues campagnes, et on préfère alors à ces derniers des univers à l’identité marquée et relativement simple (Gangs of Mutants of New York reprend par exemple le principe des Tortues ninja). Le format court est donc mieux utilisé pour des one shot et en tenant les joueurs dans un espace narratif restreint.

Mais alors la conception d’un jeu de rôle en format court, comment ça se passe finalement ? Et bien on peut la réduire à cinq composantes essentielles : Un Concept initial, un Univers , des Personnages , une Mécanique de résolution et un Générateur scénaristique.

Puisque c’est un terrain propice à l’expérimentation, on commence par poser un Concept initial particulier, peu usité. La première idée qui passe par l’esprit et qu’on jette parce qu’elle est absurde peut trouver son essor ici. On imaginera ensuite ce concept développé en mécaniques de jeu que l’on charcutera pour les réduire à un unique système de résolution. Mais une chose à la fois.

L’Univers développé ne doit pas l’être tant que ça car cela impliquerait trop de règles. Il s’agira donc plutôt de l’évoquer, d’en donner le ton et l’ambiance. Il est ainsi recommandé de se tourner vers la pop-culture pour laisser aux joueurs un terrain connu, dans lequel ils retrouvent quelques repères. La plupart des formats courts s’introduisent ainsi en se comparant à tel ou tel film ou série. Évidemment, il ne s’agit pas de simplement reprendre un genre cinématographique et d’y coller un système de dés. Comprendre les codes de genre permettra de les détourner, afin d’offrir une expérience inédite aux joueurs ou de les retranscrire en mécaniques de jeu, pour une meilleure immersion.

Les Personnages comme l’Univers doivent avoir une identité marquée, idéalement qui sort des canons du jeu de rôle. Leur concept doit tout de même rester assez simple pour admettre une grande variation de comportement et de forme, mais aussi afin que les joueurs puissent se les approprier rapidement en y apportant leurs propres idées.

La Mécanique de résolution, la seule donc, sera au centre du jeu. C’est ici que toute l’expérimentation résidera, même s’il est possible de s’inspirer de systèmes existants et de les remanier, les simplifier. On peut à l’inverse abandonner les dés et se tourner vers du matériel de jeu peu utilisé, comme les cartes, les jetons, etc.

Le Générateur scénaristique est supposé être une assistance plus qu’un guide. S’il permet de lancer l’intrigue, celle-ci sera généralement bien nourrie par les actions des joueurs et les traits de leurs personnages. On peut alors se contenter de tables aléatoires, à l’image des tables de rencontre de donjon et qui serviront soit à faire démarrer le scénario, soit à retourner la situation.

Pour aider à la conception, de nombreux outils existent, eux-mêmes sous forme de jeux qui plus est, ce qui permet finalement de jouer à créer des jeux. On peut ainsi citer les Mécanicartes qui fournissent des idées de support et de concept pour les jeux de sociétés ou les Rory’s story cube qui présentent sur chacune de leur face des éléments pouvant inspirer les créateurs (ou pas d’ailleurs, j’ai vu un de ces dés tirer un oignon en guise de résultat). Il est possible aussi, si l’on est concepteur et que l’on a une pléthore d’idées qui nous laissent indécis, de produire des tables aléatoires pour la conception et de rattacher les grandes lignes de son jeu -comme l’ambiance, l’univers, l’objectif- aux résultats.

Et dans le concret
Pour l’heure qui restait de l’atelier, nous avons donc mis en pratique ces méthodes selon un procédé simple. Chacun choisissait un type de personnage, puis un concept initial, une situation de départ. Ayant voulu faire le petit malin, j’ai utilisé un concept que je voulais développer dans mon propre jeu de rôle, afin que les réflexions du jour me bénéficient ensuite. Seulement voilà, il fallut ensuite donner ses personnages à son voisin de droite et sa situation initiale au voisin de gauche. Une fois dispersés, mes deux concepts ne semblaient plus si malins. Ma voisine de droite écopa donc de Tsukumogami qui voulaient s’échapper d’une mine, et mon voisin de gauche dut faire avec des activistes qui voulaient s’échapper eux aussi, mais d’une maison japonaise cette fois.

Quant à moi, j’avais désormais à m’occuper de « Suivants de chevaliers » « abandonnés par les personnes auxquelles ils tiennent ». Et comme j’avais joué avec les Mécanicartes juste avant, je me suis donné la contrainte supplémentaire d’avoir un système de pioche de jetons.

Quand je me suis retrouvé avec les deux pièces de concept entre les mains, la première chose qui m’est venue à l’esprit était l’écuyer de Sacré Graal, chargé comme une mule et utilisant des noix de coco pour compenser l’absence de cheval en en faisant le bruitage. Je suis donc parti sur cette ambiance bras cassé, où une équipe pas très fine d’écuyers avait été abandonnée par ses chevaliers et décidait de partir à leur recherche. Les péripéties étaient celles que l’on pouvait trouver dans tout univers médiéval et fantasy : des bandits de grand chemin, des invasions barbares, des sorcières et des trolls, etc.

Le système de résolution m’a donné un peu de fil à retordre, parce que je n’avais jamais joué à piocher des jetons jusque là. Et puis il n’y avait que deux couleurs à disposition, ce qui donnait un système de résolution Échec/Réussite assez binaire. Heureusement, Manuel m’a permis de donner un côté plus vivant à ce système. Ainsi, lorsque les joueurs piochent une Réussite, il la conserve. À l’inverse les Échecs sont toujours remis en jeu. De cette façon, plus les joueurs avancent dans l’aventure et plus celle-ci se complique car les jetons Réussites sont plus rares. Et pour éviter l’inéluctable instant où les joueurs seraient voués à l’échec, faute de jetons Réussite, j’ai ajouté le principe des Calamités, qui permet d’enrichir le caractère d’un personnage tout en apportant sa pierre à l’intrigue, et au système de jeu. Les joueurs peuvent alors quand ils le souhaitent invoquer la Calamité de leur personnage, Calamité dont la résolution permet la remise en jeu de jetons Réussite, pour un rééquilibrage bienvenu des chances.

Le résultat en image

Nous étions une dizaine à participer à cet atelier, pour des résultats très divers. Cela allait du jeu où des pièces d’armure animées devaient guider un aventurier débutant dans un donjon, au concours du plus gros mangeur de boucherie parmi un groupe de notaire (ou quelque chose comme ça). Bref des tas de personnages que l’on n’a pas l’occasion d’incarner souvent.

Et après ?
Je ne vais pas dire que depuis cet atelier je gribouille des formats courts d’une page jour après jour. Ceci dit, ma vision du jeu de rôle a pas mal évolué et surtout ma vision de la conception ! Je regarde l’usine à gaz que j’ai produite jusque là et je commence à voir ce qui peut être jeté et ce qui peut être conservé afin de réduire la charge de règles.

En tout cas c’est un exercice que je recommanderais à tous les concepteurs ici bas !

Références
Podcast Ludologies
https://soundcloud.com/ludologies

One page dungeon Contest
https://www.dungeoncontest.com

Dk de Poche
http://legrumph.org/Terrier/?Jeux-de-role/dK-de-poche

Les jeux de rôle de Philippe Tromeur
http://philippe.tromeur.free.fr/53/index.htm

Podcast sur Ghost/Echo de John Harper
http://www.lacellule.net/2016/05/podcast-one-shot-n45-ghostecho-de-john.html

Lady Blackbird de John Harper
http://ladyblackbird.ecuries-augias.com

Searchers of the unknown de Nicolas Dessaux
http://www.lulu.com/shop/nicolas-dessaux/searchers-of-the-unknown/ebook/product-21361368.html

Cthulhu Dark de Graham Walmsley
http://legrumph.org/Terrier/?Jeux-de-role/Cthulhu-Dark

Patréon de Grant Howitt
https://www.patreon.com/gshowitt

Aux marches du pouvoir de Manuel Bedouet
http://www.shamzam.net/blog/nos-jeux-deroles/aux-marches-du-pouvoir/

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Utopiales 2017 – 2ème journée : Les temps du jeu vidéo

Quand le jeu vidéo joue avec notre temps était donc l’intitulé de cette conférence qui accueillait Fibre Tigre –Out there et Out there chronicles, d’ailleurs en démonstration durant la semaine-, Jehanne Rousseau du studio Spiders, Dave-David Calvo -qui a écrit Toxoplasma entre autres- et William David de Swing Swing Submarine.

Le contenu de cette conférence était assez varié, on refit rapidement un point sur le temps de la création, on évoqua des expériences de jeu marquantes par leur aspect chronophage et on en vint à la façon dont les jeux géraient leur temporalité. Mine de rien, il y avait beaucoup à dire.

Le temps des concepteurs
Puisque tous les intervenants étaient des professionnels du jeu, chacun put partager son expérience quant à la façon de gérer la phase de conception, qui était aussi vue comme un temps de gestation, en quelques sortes.

Il est ainsi conseillé de garder du temps pour soi, afin de s’imprégner d’expériences et d’inspirations extérieures qui pourront nourrir le concept de jeu. C’est en effet connu que le jeu vidéo est un média qui s’est construit en empruntant beaucoup à ses prédécesseurs et qu’une musique, une réplique de film ou une ligne d’un livre peut suffire à imaginer un élément de jeu.

Inutile aussi de garder la tête enfouie dans un seul et même projet, il est en fait plus sain de partager son temps entre plusieurs créations. Cela afin de prendre du recul sur chacune, de s’en reposer un peu et de ne pas enfermer son esprit dans un même schéma trop longtemps. Personnellement je jongle entre deux projets de création de jeu et quelques exutoires créatifs et je dois dire qu’un peu de distance permet effectivement des réflexions plus pertinentes après coup.

Le temps des joueurs
En tant que joueurs maintenant, les invités évoquèrent leurs expériences sur des jeux particulièrement chronophages, visant en particulier les MMO mais aussi des jeux de stratégie comme Civilization. Un coup d’œil à la librairie Steam de mes amis me fait dire que Europa Universalis tient aussi une bonne place au tableau. Difficile d’expliquer comment on peut perdre ainsi la notion du temps devant un jeu, mais avec une analyse rapide en amateur, je dirais que cela arrive quand l’expérience de jeu conserve une dynamique soutenue tout au long de la partie. Quand on n’arrive plus à définir une action prioritaire par rapport aux autres et que chaque mission paraît aussi importante que la précédente, on ne sait plus quand prendre de pause et donc on se lance indéfiniment dans l’aventure.

Je me souviens que ça m’est arrivé quand je jouais à Final Fantasy XIV et que j’ai voulu m’enfiler tout l’arc scénaristique de ma classe d’un seul coup. A 6h du matin, ça ne me paraissait toujours pas indigeste.

Petite mise en garde toutefois vis à vis de certains jeux, ou disons une certaine catégorie de jeux. Ou disons le carrément, les free-to-play.

On entend parfois dire que le jeu vidéo est un média encore jeune et que ses codes ne sont pas tout à fait matures. C’est de plus en plus faux dans la mesure où ces codes ont été suffisamment étudiés pour qu’on puisse en tirer quelques mécaniques malsaines. Provoquer l’addiction chez les joueurs, dans le pur style béhavioriste* est ainsi un écueil que l’on retrouve facilement sur les jeux en ligne et mobile.

Et en attendant que les législations poussent ces jeux -comme ils ont poussé par exemple les casinos- à prendre leurs responsabilités vis à vis des joueurs, ce sont ces derniers qui doivent se méfier. Je pourrais sans doute en parler plus longtemps, puisque ça été le sujet de mon mémoire d’études.

Le temps de la narration
Pour en revenir à des points plus techniques et moins éthiques, le sujet suivant portait sur le déroulement de la narration dans les jeux vidéo. En effet, si le joueur doit rester le moteur de l’histoire, celle-ci doit-elle pour autant se mettre en pause en l’attendant ?

Cette question du temps continu ou du temps suspendu ne se pose plus vraiment dans l’industrie du jeu vidéo, puisque toutes les productions ou presque choisissent la seconde alternative. On se retrouve donc avec un décalage assez singulier, surtout lorsque le scénario cherche à provoquer une urgence narrative. Il vous alerte par exemple d’une fin du monde imminente, pendant que vous faites les courses pour le voisinage au cours de quêtes secondaires. Farcry pousse la chose même plus loin, puisque s’il reste trop longtemps sans toucher la manette, le joueur provoque un arrêt du temps dans le jeu, aussi simple que cela.

Daggerfall de la série The Elder Scrolls, avait en son temps pris le parti inverse pour une plus grande immersion. Les événements manqués avaient alors des conséquences auxquelles le joueur devait faire face pour la suite de l’aventure. On y perdait les mises en scène cinématographiques dont l’industrie est friande aujourd’hui, mais on y gagnait un univers plus organique, plus intéressant à appréhender. Enfin je suppose. J’avais quatre ans à l’époque.

Ha, et il semblerait que la narration soit censée suivre un rythme qui fluctue en intensité, laissant des zones de calme pour mieux capter l’attention en repartant crescendo. Je ne m’explique donc toujours pas comment j’ai pu me laisser ainsi balader en Eorzéa ou sur Azeroth sans que moi ou mon personnage trouvions un moment de repos.

Les mécaniques de temps
Plus technique encore, la façon dont est géré le temps de la partie par les mécaniques de jeu. Fibre Tigre nous parlait alors d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître, puisque la sauvegarde n’existait pas. D’après son témoignage, le concept est arrivé en faisant de grandes vagues et était considéré aux premiers instants comme une facilité excessive, presque de la triche. La possibilité de revenir à un point choisi du jeu, de poser son check-point, c’était quelque part perdre l’enjeu de la partie : on ne prenait plus de risque à avancer. Aujourd’hui, les jeux sauvegardent automatiquement à chaque étape plus ou moins importante de la partie, gâchant même les apparitions « surprises » des boss. Mais considérant l’usage démesuré du mode online, ce n’est peut-être pas plus mal. Surtout en zone rurale.

Tout de même, des jeux sans sauvegarde… J’ai entendu parler de cette époque. C’était un temps où, dans les salles d’arcade, il fallait faire l’offrande d’une pièce pour obtenir le droit de recommencer un jeu à zéro. A l’époque, ce qui passait pour une sauvegarde, c’était des mots de passe que le jeu donnait à la fin d’un niveau, et qu’il fallait noter pour y revenir. Évidemment, quand on était nul, on pouvait toujours obtenir ces mots de passe dans des magazines spécialisés ou les négocier dans la cour de récré. Je ne connais pas le cours exact d’une soluce de jeu dans les années 90 ni son coût moyen en billes/pogs/cartes pokemon/goûter. Je n’étais pas si mauvais que ça.

Un autre concept qui affecte la temporalité des jeux, est le tour par tour des RPG, mais aussi de certains jeux de stratégie. Cette mécanique amène des enjeux très différents aux parties, puisque ce n’est pas l’adresse ou la réactivité du joueur qui sont mises à l’épreuve, mais sa capacité à prendre les bonnes décisions, avant et pendant la bataille. Ici, on est clairement dans du temps suspendu puisque les protagonistes et leurs ennemis peuvent se regarder dans le blanc des yeux pendant des heures avant que le combat avance d’un pouce.

Enfin, plus récemment les jeux connurent l’essor du QTE, cette sorte de cinématique interactive où des scènes sont diffusées au ralenti afin que le joueur ait l’occasion d’appuyer sur une touche pour avancer. Cette mécanique fut usée parfois à outrances dans les grosses productions, mais je ne sais pas si depuis les concepteurs ont décidé de calmer le jeu.

Le temps des responsabilités
La conclusion de cette conférence revenait vers l’un des concepts abordés plus haut qui était celui des jeux volontairement addictifs. Les intervenants se sont ainsi accordés sur le fait que le jeu vidéo évoluait -et devait évoluer- et que donc les concepteurs devaient accorder leurs responsabilités en conséquence.

On prenait pour exemple la question du retour du joueur. Cette question, c’est à la fois se demander comment faire pour replonger le joueur dans les mécaniques de jeu après qu’il se soit absenté plus ou moins longtemps, mais aussi comment faire en sorte qu’il pense au jeu en dehors de son temps de partie. Évidemment, pour les jeux qui dépendent de l’addiction qu’ils peuvent provoquer, c’est le deuxième aspect qui importe le plus. Et plusieurs mécaniques existent d’ores et déjà pour aller dans ce sens : gratifications planifiées et régulières, rappels des joueurs absents, calendrier d’événements…

Ainsi, mieux comprendre la façon dont les joueurs appréhendent un jeu est important, mais ce qui l’est plus encore, c’est de ne pas utiliser cette compréhension pour les manipuler.

Malheureusement, les arguments de vente ont toujours un grand poids dans la conception de jeu. Ainsi la tendance actuelle du streaming, en majorité sur Twitch a désormais un impact sur la narration. Les productions actuelles cherchent alors à s’adapter à ce format et prennent donc en compte de nouveaux paramètres, tels que l’intérêt d’une audience, la capacité du joueur à commenter ses actions, etc.

Personnellement, je m’interroge un peu sur la capacité du jeu vidéo à réellement arriver à maturité et à se forger ses propres valeurs. Ce média relativement jeune est né dans un monde qui change très vite et est donc lui-même en perpétuelle mutation, des mutations qui sont plus souvent motivées par l’argument mercantile que par des contextes historiques ou sociaux -comme en a connu le cinéma par exemple. Et je ne compte même pas les communautés de joueurs qui sont réfractaires à l’idée que les jeux leur offrent autre chose que du divertissement. Dans ces conditions, difficile d’en analyser les tendances et d’en fixer les codes ou d’en tenir une chronologie autre que technique.

*Le béhaviorisme est la science du comportement, elle permet d’en comprendre les mécanismes et est particulièrement utilisée en marketing pour diriger les consommateurs.

Utopiales 2017 – 1ère journée : Le temps dans des cases

Pour cette conférence nommée Le temps en BD étaient reçus Valérie Mangin et Denis Bajram qui ont travaillé ensemble sur la bande dessinée Abyme, une œuvre qui parle bien entendu de mise en abîme. On pourra pas faire plus explicite. Avec eux, on comptait aussi Grégory Panaccione et Giorgo Albertini qui ont tous deux travaillé sur Chronosquad et Yoann à qui l’on doit les aventures du Marsupilami.

Les intervenants firent une rapide entrée en matière en évoquant la BD L’Art Invisible de Scott McCloud. C’est qu’il est difficile d’aborder le sujet du temps dans la bande dessinée sans parler de cette œuvre qui en fait à la fois la théorie et la démonstration. A dire vrai, la conférence aurait pu se résumer à une heure de lecture de cette BD, mais je suppose que dans ce cas on aurait invité Scott McCloud tout seul et ce n’était pas vraiment le but.

Cette conférence fut riche en expériences, illustrées au projecteur par des extraits de travaux des intervenants et d’autres artistes. On put ainsi observer un exemple de temporalité étalée sur un décor, là où un personnage était vu au départ d’un chemin qui se déroulait sur toute la page jusqu’à la destination finale. Le voyage, seulement commencé par le protagoniste est ainsi laissé au regard du lecteur qui cheminera le long du sentier.

Une case d’un album de Tintin nous montrait aussi la décomposition d’un mouvement répartie sur différents personnages. En l’occurrence il s’agissait du mouvement d’attaque de plusieurs soldats semblables en apparence et en uniforme, qui avançaient chacun d’une étape : l’un armait, le second se levait, le troisième tirait et le quatrième allait en avant.

Il était difficile d’être exhaustif car selon que l’on se trouve dans une même image, que l’on passe d’une case à une autre ou d’une page à la suivante, les possibilités de mesure du temps sont différentes. Parmi les exemples proposés, on pouvait voir la courbe d’un soleil étalée sur toute une page, mais découpée en une succession de cases, chacune montrant la position des personnages alors qu’ils approchaient de l’astre.

Il est important de hiérarchiser les éléments d’une bande dessinée, en comptant par exemple le fait que les plus grandes cases tiennent lieu d’ancres temporelles. Au sein d’une case, la position des bulles pour un dialogue donne par exemple du rythme à la conversation. Ainsi, des bulles qui s’empilent dans une case haute et étroite forment un dialogue aux répliques qui s’enchainent, alors que les personnages se répondent du tac au tac ou empiètent l’un sur la parole de l’autre.

D’autres détails peuvent influencer la perception du temps par le lecteur. Le dessin du trait peut ainsi donner de la vitesse ou de la dynamique à la scène. La densité du texte dans une case peut prolonger le temps de lecture et donc rallonger les événements présentés.

A un point de l’heure, il fut utile de préciser que ces « règles » étaient principalement admises en occident. D’autres cultures fonctionnaient selon d’autres codes, comme les manga qui se lisent de droite à gauche d’une part, mais dont les dialogues se lisent en plus de haut en bas.

Enfin, la conférence se conclut sur la question de savoir si les créateurs n’étaient pas trop frustrés par la démesure entre le temps de réalisation d’une BD et le temps de sa lecture. Mais les intervenants n’en étaient pas inquiétés, car d’après eux une bande dessinée connait toujours plusieurs lectures. Il y avait ainsi d’abord la lecture du texte, aussi rapide que s’enchainent les dialogues, puis des lectures successives où le lecteur s’attarde sur les images. Et pour chacune de ses relectures, la vision de la bande dessinée s’affine et se précise pour en saisir les moindres détails.

En un sens, la BD c’est un peu comme un film qu’il n’est pas bizarre de mettre en pause ou de rembobiner régulièrement pour en décrypter les images.

Utopiales 2017 – 1ère journée : Jouer avec le temps

Cette conférence intitulée Univers intemporels était tenue par trois passionnés de jeux de rôle venus partager leur vision de ce loisir. On comptait donc Julien Pouard des Voix d’Altaride, Romain McKilleron tenant le site experiencejdr.fr et Manuel Bedouet du podcast Ludologies. Tous trois étaient présents afin d’offrir aux Maîtres du jeu des astuces pour aborder des concepts complexes et délicats à mettre en scène, comme les voyages dans l’espace et le temps.

Notez pour la suite que tous les jeux de rôle évoqués ici peuvent être retrouvés sur les podcasts et sites des intervenants, mais aussi sur le site du Guide du Rôliste Galactique, legrog.org

Multivers
Ce n’est déjà pas toujours facile de donner vie à un univers en jeu de rôle, alors imaginez gérer deux univers parallèles… Les voyages d’un univers à un autre sont justement utilisés pour déstabiliser les joueurs, leur faire perdre leurs repères, plus encore si les acquis comme la magie ou la technologie se trouvent chamboulés. Mais c’est aussi un bon moyen d’enrichir l’expérience de jeu, en offrant de nouveaux lieux à visiter et de nouvelles règles à appréhender. Pas forcément des règles de jeu, d’ailleurs. Des codes de société nouveaux ou des lois de la physique différentes peuvent être intéressants à expérimenter.

Plusieurs jeux de rôle jonglent avec ce concept, chacun à sa manière. Mega propose d’incarner des messagers galactiques (dont la juridiction s’étend en fait au multivers) qui transfèrent leurs esprits vers des hôtes afin de voyager entre les mondes, voire dans des univers parallèles. Les héros de The Strange emploient un procédé similaire, puisque pour chaque univers parallèle qu’ils visitent, ils adoptent une apparence adaptée.

Ce que l’on distingue dans ces deux exemples, c’est que le multivers est une toile de fond, un contexte pour les aventures des personnages dont l’adaptation à l’environnement étranger se fait automatiquement.

A l’inverse, les héros de Torg verront leurs pouvoirs et leurs capacités affectés par l’univers qu’ils visitent, puisque certains sont imperméables à la magie ou à certaines technologies (ou n’ont tout simplement pas de couverture réseau).

Ambre propose une approche plus créative sur le thème, puisque les joueurs sont impliqués dans la construction et le déroulement de ces univers parallèles. Ainsi, lorsqu’ils visitent l’un de ces lieux, ils peuvent en déclarer les règles et le Maître du jeu se chargera de la résolution des actions selon celles-ci.

Téléportation et assimilés
La téléportation, ou le déplacement d’un point A à un B en un temps perçu comme instantané est une mécanique redondante des jeux de rôle, que l’on retrouve parfois comme pouvoir et souvent comme astuce narrative.

Ainsi un voyage, s’il n’apporte rien à l’histoire, peut être compressé par une ellipse, à la façon des déplacements rapides de certains RPG. Rêves de Dragon a pris le parti d’intégrer cette compression du temps à son univers, puisque les moments dits « de vide » se perdent dans le « Gris-rêve ».

Autre procédé assimilable à la téléportation : Les personnages passaient une bonne et banale journée, puis se réveillent soudain dans un endroit inconnu, frappés d’amnésie. Pour les personnages comme pour les joueurs, cette introduction in media res est facilement perçue comme un déplacement instantané.

La téléportation en tant que pouvoir, individuelle ou par portail, est délicate à intégrer dans les règles puisque son utilisation par les joueurs peut se révéler imprévisible, voire dangereuse pour le scénario. Il convient donc de lui donner des limitations d’usage, des coûts d’utilisation significatifs. Certains préfèreront cantonner son usage aux Maîtres du jeu, alors que d’autres sont partisans de laisser les joueurs expérimenter le concept et d’en dicter les conséquences.

Temps
Le temps, qui nous échappe et qu’on peine à saisir dans la vraie vie, se montre bien plus malléable une fois entre les mains d’auteurs. On peut le prendre à rebours (à la manière du film Memento), le faire boucler(Un jour sans fin), l’étendre ou le comprimer. Plusieurs jeux de rôle permettent d’expérimenter avec ce temps délinéarisé. On peut compter ainsi Fiasco, qui embarque les personnages dans des désastres abracadabrantesques ou Microscope qui joue sur l’échelle d’une frise chronologique et la possibilité de dessiner de grandes périodes et détailler certains événements.

Dans le jeu de rôle, on distingue tout de même deux tendances majeures dans ces manipulations temporelles : aller de l’avant dans des « flashforward » et revenir en arrière au cours de « flashback ».

Ce dernier procédé reste plutôt bien intégré et est utilisé en diverses occasions, souvent pour enrichir l’expérience des joueurs ou les faire réagir à un déroulé d’événements. Ainsi dans Odyssea, jeu dans lequel les personnages devront sacrifier une personne pour avancer d’une île à une autre, flashback et flashforward sont employés pour susciter l’empathie vis à vis du sacrifié. Les flashback permettent aussi d’étoffer le passé d’un personnage, ou de raffermir les liens entre plusieurs d’entre eux. En ce sens, il est toujours préférable que les joueurs participent à son déroulement, plutôt que de laisser le Maître du jeu le résumer. Par exemple, le jeu Scion plonge parfois les joueurs dans des flashback qui auront un impact sur le futur de la campagne.

Blades in the dark intègre directement les flashback à ses mécaniques de jeu. Ainsi -à la manière de Ocean’s eleven et ses suites- les joueurs pourront amener des éléments de leur plan dans la partie pour se sortir de leurs mauvais pas. Le déroulé du plan se construit ainsi en même temps que son exécution, à mesure que les personnages en amènent les ficelles.

Les flashforward quant à eux, sont plus délicats à introduire. Notamment parce qu’ils imposent un futur, donc une limitation, dans une histoire en construction. Ce sont généralement les prophéties, et autres promesses d’événements dramatiques, que l’on va amener les joueurs à provoquer alors qu’ils tentent de l’éviter.

Considérant l’aspect très malléable de la narration dans les jeux de rôle, il faudra parfois se résoudre à ce que les prophéties admettent une marge d’erreur, d’où l’intérêt de les rendre sibyllines. Il est aussi possible pour les préserver de les situer hors de la zone d’influence des joueurs, c’est à dire en un temps d’après la partie de jeu.

Dans une autre mesure, on peut utiliser les flashforward afin de présenter aux joueurs plusieurs issues à un choix et leur permettre d’en sélectionner une. Mais cet effort est rarement nécessaire pour les Maîtres du jeu car, d’expérience, les joueurs auront tendance à produire eux-mêmes les hypothèses les plus absurdes, parfois allant très loin, à chaque choix qui s’offre à eux.

Peu importe le procédé, la manipulation du temps dans le jeu de rôle peut à divers degrés introduire l’étrange dans la partie de jeu, lorsqu’elle devient le cœur de l’intrigue ou qu’à l’inverse elle vient la perturber par petites touches.

Temps du rêve
Le temps du rêve est un temps dont la mesure a été perdue et ne correspond plus au temps de la réalité. C’est un temps hors du temps, utilisé généralement pour la compression ou au contraire l’allongement des événements.

Il est au cœur du jeu Rêve de Dragon, évoqué plus haut, et participe à la destructuration du réel qui vient déstabiliser le joueur. On le retrouve dans Hystoire de fous, où la mesure du temps est chamboulée par les épisodes psychotiques que vivent les personnages.

Le jeu Changelins combine ce temps du rêve et le principe du multivers en plaçant les joueurs comme prisonniers d’un espace parallèle où le temps s’écoule différemment. Ainsi, le rêve ne devient pas qu’un espace échappant aux conséquences du passage du temps. Dans un endroit où l’on peut perdre dix ans de vie en une heure de notre réalité -ou vice versa- s’échapper devient un enjeu important. Les joueurs, lorsqu’ils choisissent de visiter à nouveau cette dimension, devront donc bien calculer la durée que leur séjour représente dans leur monde.

La liberté de l’auteur au service du jeu
La grande souplesse du format jeu de rôle permet aux Maîtres du jeu et aux joueurs d’appréhender tous ces concepts à divers degrés. Ils peuvent être utilisés comme toile de fond ou comme contexte au travers duquel les joueurs évolueront. Ils peuvent faire partie intégrante des mécaniques de jeu et entrer dans la réflexion des joueurs ou au contraire être utilisés comme astuce afin de fluidifier la narration.

Mais ce qui peut donner les résultats les plus surprenants, et donc les plus intéressants, c’est lorsque ces concepts sont mis entre les mains de joueurs désireux d’expérimenter. Cela peut néanmoins demander une certaine gymnastique mentale de la part du Maître du jeu.

Utopiales 2017 – 1ère journée : Création de jeu

Pour cette deuxième conférence, l’intitulé était : Le temps de la création, et nous avons donc pu bénéficier de l’expérience de plusieurs professionnels du jeu vidéo qui sont : William David de Swing Swing Submarine, Vanessa Desbiens de Bishop Games et Michael Pieffert du studio Mi-clos. A noter que cette conférence était interactive, c’est à dire que le public pouvait lancer ses questions tout du long et pas seulement à la fin. Je me suis personnellement abstenu, trop occupé avec mes notes. Parler ou écrire, il faut choisir.

En temps et en heure
La première question, sans doute pour coller avec le thème de la semaine, portait sur le temps moyen que pouvaient prendre la conception et la production d’un jeu vidéo. Comme on pouvait s’y attendre la réponse était de l’ordre de « ça dépend ». C’est vrai que on ne fait pas un jeu indé comme on fait un triple A, et qu’un jeu solo ne demande pas le même investissement en temps et en efforts qu’un MMO.

Le temps de la production toutefois, est fragmenté de la même façon pour la plupart des studios, à peu de choses près.

Il y a d’abord la Pré-production, le temps d’avant le jeu, où les game designers vont lancer, modeler, jeter et relancer des concepts de jeu jusqu’à en poser un.

Vient ensuite l’étape de Prototypage où l’on teste les différentes mécaniques de jeu, leur faisabilité, leur jouabilité, l’attrait qu’elles peuvent avoir et l’expérience joueur qu’elles peuvent susciter.

Après cela, on passe à l’Alpha qui est la phase de test en interne du jeu. Les différents membres de l’équipe prennent en main leur création et peuvent ainsi en appréhender la cohésion.

Vient alors la phase de Bêta, où les testeurs sont embauchés pour mettre à l’épreuve les mécaniques de jeu, chercher les failles dans le système et donner un retour d’expérience. Pour certains MMO, les joueurs peuvent être invités en masse à poser les yeux sur les dernières nouveautés et à expérimenter les premiers bugs.
On appelle aussi cette phase « accès anticipé » lorsque les bêta testeurs payent pour faire leur boulot. Inutile de dire que les intervenants n’étaient pas à l’aise avec ce procédé.

Même si le temps de production d’un jeu est variable, il est conseillé de lui donner une fin. Les perfectionnistes auront en effet tendance à vouloir retarder le moment de la publication afin de peaufiner, fignoler, donner un dernier coup de polish à leur création. De l’importance de la deadline…

On note d’ailleurs que sur 10 idées de jeux, une seule parvient réellement au bout de ce processus de création. Les 9 autres ne passent même pas toujours la pré-production et les projets peuvent être rejetés à différentes étapes de leur développement. Parfois ils sont avortés alors que leur concept et leur prototype étaient pourtant déjà bien aboutis. On en déduit ainsi que 90% du travail d’un game designer consiste à remplir une corbeille.

L’étincelle de la création
Avoir l’idée d’un nouveau jeu vidéo peut sembler aisé, mais par quel bout faut-il prendre la création ? Pour certains ce sera l’idée d’un gameplay, l’envie d’expérimenter certaines mécaniques de jeu. Pour d’autres ce sera la perspective de raconter une nouvelle histoire. D’autres encore chercheront comment combiner ces deux aspects au service d’une expérience joueur spécifique. J’ajouterais qu’il y a aussi des créateurs, pas forcément majoritaires, qui cherchent à mettre en relation ces trois composantes pour adresser un message à leurs joueurs.

Une autre question évoquait le lien entre l’industrie du jeu vidéo et les scénaristes de métier, de plus en plus souvent sollicités. La meilleure approche pour un scénariste est alors ou bien de se greffer à une équipe en recherche de ses compétences ou bien d’en aborder une et d’y initier un projet. Il paraît même que les studios sont ouverts à ce genre de proposition !

La dernière question*, venue clôturer le sujet, portait sur la place du son et de la musique dans les jeux vidéo. Ou plutôt la place des compositeurs et sound designer. Ces derniers pouvaient travailler en interne dans le studio, ou être des intervenants externes. Dans tous les cas, il était important d’échanger abondamment avec eux afin qu’ils puissent capter l’essence du jeu développé et la retranscrire harmonieusement en musique.

En fait, mesurer le travail de création d’un jeu vidéo est difficile tant l’échelle des studios peut varier. Les grandes équipes mènent des productions longues de plusieurs années pour aboutir à des millions de ventes, alors que les indépendants plus modestes tenteront d’abattre plus régulièrement de plus petites quantités de travail. Parfois, les impératifs financiers (pour ne pas dire actionnaires) exigent une ponte annuelle des œufs d’or, ce qui provoque immanquablement une compression des équipes ou de la qualité du produit final. Si vous vous demandez pourquoi votre perle de l’E3 est toute buguée à sa sortie, ne cherchez pas trop loin, c’est parce que sa principale raison d’être est de payer leurs soirées Bahamas-cocaïne à une bande de foufous à cravate.

*En vérité, il y avait une autre question après celle-ci, une question qui même en 2017 revient encore et encore dans les bouches et dans les médias. Un petit vieux à l’air très concerné avait demandé si les créateurs étaient bien conscients de la violence que véhiculaient les jeux vidéos et les intervenants se sont mis à transpirer très fort. Heureusement, aucun d’entre eux n’était coupable du meurtre de figures pixelisées.